*** House of Gucci, 2021. Lady Macbeth du district de Milan

Ridley Scott a consacré son dernier projet à la maison de mode Gucci et à l’histoire de guerres féodales autour de la marque. Le premier pas vers la chute était une rencontre dans une boîte de nuit Maurizio Gucci (Adam Driver) avec une Italienne très passionnée et persistante — Patricia Reggiani (Lady Gaga). Rudolfo, le père de Mauricio (Jeremy Irons), un esthète sophistiqué avec une très bonne intuition, a refusé de bénir cette union, et Maurizio a été contraint de quitter sa maison riche et de prendre un travail comme ouvrier dans un dépôt de bus de son beau-père. Après le mariage inévitable, Patricia a commencé d’établir des contacts avec Aldo Gucci (Al Pacino), un frère de Rudolfo. En profitant de l’incompréhension et l’aversion mutuelles entre deux frères et entre Aldo et son fils Paolo (Jared Leto), Patricia a vissé son mari dans le coeur de la maison de couture : très vite, il est devenu un gestionnaire supérieur à New-York chez son oncle. Avec les mains de Paolo, Maurizio envoye Aldo en prison, et suite à la morte de Rudolfo, le héros principal devient le seul propriétaire de l’entreprise. Ici commence le deuxième et très court chapitre de la vie de Maurizio. À la recherche d’argent pour développer son entreprise, il se tourne vers des investisseurs arabes et rompt presque en même temps avec Patricia, réalisant qu’elle est sa Lady Macbeth. Dépourvu de talent managérial, Maurizio est contraint de vendre entièrement sa part aux Arabes, et très vite, il est tué par son ex-femme à l’aide de deux tueurs siciliens à cause de la jalousie et de l’avarice.
House of Gucci

Le réalisateur est un maître, un classique vivant. En racontant cette histoire presque entièrement composée de dialogues et donc ayant une limite mise en scénique, Ridley Scott se concentre plut tôt sur les acteurs. Le casting de film est incroyable – presque chacun est un lauréat d’Oscar (même pour une chanson) ou un lauréat futur (Adam Driver, sans doute). Ridley Scott a même trouvé la place dans cet ensemble pour l’épouse du propriétaire actuel de Gucci – François-Henri Pinault dont la femme Salma Hayek joue un rôle épisodique. Le seul problème du casting de quatre grands acteurs dans les rôles de Guccis et de Lady Gaga comme Patricia, un problème déjà beaucoup cité et noté, c’est manque de vrai ensemble. Tout le monde est bon, mais souvent tout le monde joue sa propre rôle. Lady Gaga est très excentrique et active – mais c’est exactement ce à quoi elle a droit par son rôle — une simple femme stupide qui a grimpé dans la haute société et dont les astuces simples ne la rendaient pas heureuse à long terme. La ligne de Rudolfo Gucci est marquée par la discrétion. Jeremy Irons passe la plupart de son rôle dans l’obscurité de sa villa. Un intellectuel et l’homme d’art mourant, une espèce menacée, un héros romantique («j’ai fait ce foulard pour Grace Kelly !») est une image fréquente de cet acteur. La seule scène où Irons exprime les émotions fortes, c’est un scandal avec Paolo qui a osé utiliser du marron dans ses dessins de vêtements. Assez curieusement, ç’a mis en fureur ce vieux Gucci bien plus que la fuite de son fils de la maison vers une niaise aux gros seins. L’ombre de Rudolfo est son avocat silencieux – Domenico De Sole joué par Jack Huston. Cet homme patient en noir deviendra éventuellement le PDG de la maison de mode après le départ de Maurizio. Adam Driver s’intègre dans ce film beaucoup mieux que dans «The Last Duel». Star Wars a déjà montré qu’il ne peut pas jouer les méchants. Dans «House of Gucci», le flegmatisme de l’acteur, son sourire ironique et son estime de soi intérieure, que Driver apporte à chacun de ses rôles, aide à Driver de devenir le vrai centre du film, un personnage beaucoup plus complexe que celui de Lady Gaga qui crée une image réaliste, authentique et vive, mais plate. La ligne d’Aldo est plus excentrique, surtout Paolo Gucci. Jared Leto, un fan de Gucci dans la vie ordinaire, comme d’habitude, il veut plus que tout que tout le monde voie comment il joue. Son dessin du rôle avec un maquillage complexe et beaucoup d’émotions jouées devient plus important pour l’acteur que le personnage lui-même, qui finit par rejouer gravement et s’envole de l’ensemble (ce rôle a causé le plus de plaintes des vivant Guccis). Quant à Al Pacino, l’acteur le plus grand de ce casting nous donne non seulement l’image d’un homme d’affaires sûr de lui, le rôle ordinaire pour lui, que Al Pacino peut jouer même sans se réveiller. Al Pacino est presque le seul acteur dans le film qui joue la vrai tragédie, une tragédie shakespearienne. Dans cette intrigue sur la lutte pour le pouvoir et l’argent, c’est lui qui est la principale victime de l’intrigue. L’acteur se montre très clairement la victime de la trahison, quoique brièvement (dans «The Irishman», par exemple, son personnage n’a aucun temps de comprendre quoi que ce soit).
Dans l’interprétation de Ridley Scott, l’histoire de Gucci est l’histoire de Macbeth. Le scénario a diminué gravement la quantité de Guccis (en réalité, Aldo avait quatre enfants, Maurizio, deux), et l’histoire a été simplifiée. Ridley Scott raconte une histoire d’une femme obsédée par une passion pour l’argent, qui a utilisé son mari faible pour les intrigues, et a finalement presque rien reçu. À proprement parler, Patricia a perdu beaucoup d’années de sa vie dans la prison, mais elle est libre maintenant et plus riche qu’avant son mariage à Maurizio. Ce drame est sérieux et joué par des gens respectables, donc Ridley Scott limite les images ensoleillées de dolce vita italienne. Souvent, on voit des intérieurs semi-obscurs des maisons de Rudolfo et Maurizio. En même temps, Ridley Scott est à un pas du style d’un film mafieux comme «The Godfather» (à l’exception d’une scène avec une vache, un hommage pur à Coppola). Les tons froids et gris remplacent peu à peu le soleil des premières scènes. Les costumes de ce film sont très beaux et variés (jusqu’au niveau de Wong Kar-wai – nouveaux vêtements dans chaque plan même au sein d’une scène dramatique cohérente), mais il n’y a pas de couleurs chics de Gucci moderne, seulement les costumes classiques et réservés (sauf pour la roturière Patricia). Dans le monde de Guccis, il n’y a pas de chaleur et de la lumière du foyer (c’est très ironique que la cheminée n’apparaît que dans les scènes d’aliénation des époux), parce qu’il n’y a pas de la famille. Le nom et le statut sont bien plus importants pour les créateurs de mode que les vrais liens et valeurs familiaux. Et la phrase «aucun membre de la famille Gucci ne reste dans l’entreprise» devient la principale leçon que l’auteur veut nous transmettre.

Тезисно:
1. Рассказ истории об убийстве Маурицио Гуччи его бывшей женой построен преимущественно на диалогах.
2. В данных условиях, Ридли Скотт старается сосредоточиться на актёрах, так как мизансценически его фильм довольно ограничен.
3. Кастинг фильма прекрасен (почти сплошь одни лауреаты премии Оскар), но каждый актёр играет какую-то свою роль. И если эксцентризм Леди Гаги драматургически оправдан (простушка, которая попыталась влезть на самый верх), то например, Джаред Лето играет очень нарочито и переигрывает (именно его роль больше всего критиковали оставшиеся в живых Гуччи).
4. Аль Пачино и Адам Драйвер прекрасны и на своём месте. Пачино дали сыграть трагедию предательства, которую он не сыграл только что в «Ирландце».
5. Сюжет борьбы за модный дом упрощён и превращён в современное подобие «Леди Макбет» с трагедийным финалом, когда в итоге никто не получает ничего.
6. В фильме довольно мало солнечных пейзажей и ярких костюмов. Историю кровавой борьбы за власть Скотт рассказывает в полутёмных интерьерах вилл, где действуют одинокие холодные персонажи, лишённые крепких семейных связей. Фамилия для них важнее реальной семьи, что и приводит к трагедии.

*** The Last Duel, 2021. #LadiesToo

Last Duel 2021
Le film de Ridley Scott est consacré à l’une des histoires de viol médiévales les plus connues en France. Un chevalier brusque et courageux Jean de Carrouges (Matt Damon) apprend que son épouse Marguerite de Thibouville (Jodie Comer) a été violée pendant son absence d’une semaine. Le méchant est Jacques le Gris (Adam Driver), l’ancien ami de Jean, un coureur de jupes et un protégé du compte puissant Pierre d’Alençon (Ben Affleck). Grâce au dernier, Jacques vient d’obtenir le poste de capitaine, qui devait être hérité par Jean. Se rendant compte qu’au tribunal la parole de la femme ne vaut rien contre la parole de l’homme, Jean se rend chez le roi Charles VI (Alex Lawther) et appelle officiellement Jacques le Gris au jugement divin, c’est-à-dire un duel mortel entre deux chevaliers. Selon un usage cruel, dans le cas de la mort de son mari, Marguerite sera brûlée pour le faux témoignage contre un homme.

Last Duel
Le générique de fermeture indique que l’histoire montrée est basée sur des faits réels. Ici, on peut gronder un peu sur le sujet d’une crise de scénario à Hollywood d’aujourd’hui — pourquoi au lieu d’un scénario originel, Nicole Holofcener, Ben Affleck et Matt Damon nous proposent une autre adaptation à l’écran d’un livre déjà publié («The Last Duel: A True Story of Trial by Combat in Medieval France» d’Eric Jager). Mais d’un autre côté, nous devrions plutôt dire merci aux auteurs du film, qui ont dépensé 100 millions de dollars pour un cinéma médiéval. À une époque dominée par les franchises de super-héros en spandex, Ridley Scott (qui est aussi un chevalier officiel comme son héros) nous rappelle qu’il est l’un des rares cinéastes vivant qui possède le don presque oublié de la création des films historiques. Des films où le combat au corps à corps n’est pas parce que cela semble spectaculaire à l’écran, bien qu’il soit le temps des canons laser, mais parce que c’est ainsi qu’ils se sont réellement battus. Sur l’écran, on voit des combats privés de prétentions enfantines, les combats du film avec le classement R qui n’est pas populaire aujourd’hui.
Tous les éléments principaux de ce film peuvent être trouvés dans les autres films de la filmographie scottienne. Il a déjà commencé sa carrière au cinéma par un film sur le duel, qui même s’appelle «The Duellists». Il a tourné des films sur le Moyen Âge («Kingdom of Heaven», «Robin Hood»). Il a tourné un film où le viol est un événement principal pour le sujet (mais dans «Thelma & Louise», s’était possible pour une femme de juste prendre un revolver et tuer un violeur). Maintenant, le réalisateur très expérimenté mêle l’agréable à l’utile et tourne un film qui s’intègre parfaitement dans sa filmographie. Sous les mots «agréable» et «utile», nous sous-entendons respectivement une présentation de l’époque et un commentaire sur le mouvement de #MeToo. Ridley Scott soi-même est une viсtime collatérale de cette lutte hollywoodienne contre des violeurs et agresseurs de l’industrie cinématographique — Scott a été obligé de licencier Kevin Spacey de son projet «All the Money in the World» dont la plupart a été retournée très vite avec Christopher Plummer. Maintenant, à l’époque de l’humanité et «l’égalité», pour les victimes de viols c’est très difficile parfois d’obtenir la vérité — on doit briser le «victim blaming» méprisant d’une société encore atone et patriarcale. On peut imaginer quel effort titanesque cela a coûté à une femme du XIVe siècle, une femme qui a au moins les privilèges de la noblesse.
La comparaison entre «The Last Duel» et «Rashomon» est vraiment inévitable. Pour raconter un vrai fait-divers, les scénaristes de Ridley Scott choisissent la forme déjà utilisée par Ryūnosuke Akutagawa pour décrire une viol imaginaire. 153 minutes du chronométrage sont divisées entre trois histoires ou, plus précisément, trois versions de l’événement, ou trois «vérités». La vérité du mari et suivie par la vérité du violeur et juste après deux hommes, on donne à la femme la permission de parler. C’est un vrai plaisir cinématographique à part — sur le fond de plans répétitifs, de capturer d’autres répliques ou angles, qui, d’une part, nous donnent un regard en trois dimensions sur l’histoire et, d’autre part, nous privent de la vérité, car il est insaisissable (bien que pendant le fondu enchaîné du générique du troisième chapitre, dans la phrase «la vérité selon Marguerite de Thibouville» le premier mot reste isolé quelques seconds après la disparition du nom). Seulement dans le troisième dit, rempli de larmes de femmes, on voit cette lutte contre la société. Marguerite n’est aperçue qu’une chose. Elle est la possession de son mari — ce n’est pas le viol qui est condamné, mais une tentative sur la propriété d’un chevalier. La détermination d’une femme à dire toute la vérité est condamnée par sa meilleure amie, condamnée par sa belle-mère (également une ancienne victime de viol). Le mari ne l’aime pas — pour lui, le mariage était plutôt un moyen d’améliorer sa situation financière. Jean de Carrouges est tendre à l’adresse de son épouse seulement dans sa vérité. Marguerite le décrit comme un homme grossier, préoccupé dans le lit par son propre plaisir et la volonté d’avoir un héritier. Au procès, une femme enceinte sera forcée de mentir, en répondant à des questions astucieuses sur le plaisir («la petite mort») qu’elle aurait dû avoir au lit avec son mari (et peut-être avec l’agresseur imaginaire). On voit clairement, que Marguerite a encore du bon chance — pour son mari, cette situation est non seulement la possibilité de restaurer son bon nom, mais surtout la première et la dernière possibilité de tenter tuer légitimement son offenseur et concurrent pour le poste militaire prestigieux et les territoires (Pierre d’Alençon a donné une partie de possessions foncières de la famille de Thibouville à Jacques le Gris).
Le commentaire scottien sur des actualités du monde occidental est assez du mainstream, avec peu d’ambiguïté. C’est logique, d’autant plus que le projet appartient au studio Disney, un studio plutôt conservateur et prudent. Ce qui est important au-delà de l’agenda et de la narration dynamique (avec une fin évidemment prévisible), c’est la façon dont l’histoire est racontée. Ridley Scott, qui s’est montré à son début comme un digne successeur de Kubrick, continue de tourner des films perfectionnistes à la manière de «Barry Lyndon». Scott ne se limite pas par Damon et Driver (le casting est très bon en général, sauf qu’il y a peu de mal à l’intérieur du Driver) sur fond d’un château (à propos, le château de Carrouges est encore existant et il était demeuré par les descendants du brave chevalier jusqu’au début du XX-e siècle). Le réalisateur tente de créer le monde médiéval avec beaucoup d’action sur le dernier plan de l’image. Cette plénitude d’action donne aussi un fond acoustique, et Scott, dans se film, ne détourne pas de la musique exégétique (qui est, en tout cas, bien et même tente d’être un peu médiévale). L’image de Dariusz Wolski est construite sur un contraste fort entre l’intérieur et l’extérieur. Les intérieurs sont chauds, ils sont éclairés authentiquement par des cheminées et des bougies (un bonjour parfait à Kubrick). Les extérieurs sont froids et gris — l’action se déroule plutôt aux temps froids. La scène culminante est un gâchis gris-brun de neige, d’acier et de boue. Ce n’est que dans l’épilogue que l’on voit enfin la lumière du soleil et la verdure éclatante. La beauté et la tranquillité d’un monde d’une mère, d’une femme privée enfin de l’agression masculine, un monde où Thelma et Louise ne sont jamais arrivées.

P. S. Le duel entre Carrouges et Le Gris est, en fait, l’avant-dernier. Le dernier duel judiciaire français, c’était un combat de Guy Chabot de Jarnac contre François de Vivonne en 1547.

Тезисно:
1. На уровне сюжета перед нами история предпоследней легальной дуэли во Франции — рыцарь Жан де Карруж (Дэймон) вызывает на суд божий Жака лё Гри (Драйвер), изнасиловавшего его жену Маргариту (Комер). Это история полностью базируется на реальных фактах, довольно известных во Франции.
2. Фильм прекрасно вписывается в фильмографию режиссёра, который уже снимал и про дуэли, и про Средние века, и про изнасилование.
3. Ридли Скотт — большой молодец. Хотя бы потому, что в эпоху претенциозно-детских спандексовых франшиз снимает дорогое кино о Средних Веках. Ведь хорошо снимать историческое кино — почти забытое ныне умение среди крупных режиссёров.
4. Фильм очень красивый за счёт выверенной холодной палитры и «баррилиндоновского» освещения интерьеров, построенного только на свечах и огне каминов.
5. История рассказана в стиле «Расёмона», точнее, литературного первоисточника Акутагавы. Точно также нам дают три версии («правды») истории: правда мужа, правда злодея и правда жертвы. Разумеется, они не совпадают, и отдельное кинематографическое удовольствие — ловить чуть изменённые ракурсы или реплики, когда повторяются уже виденные кадры какой-то сцены.
6. Актуальность высказывания не вызывает сомнений — авторы фильма поддерживают движение #MeToo и дают исторический комментарий. Сегодня-то жертвам насилия сложно доказать правду и приходится бороться с осуждением патриархального общества, а что уж говорить про Средние века, когда слово женщины ничего не значило, да и сама она считалась собственностью мужа. Маргарите стоит титанических усилий добиться правды на унизительнейших публичных допросах.
7. В фильме Скотт попытался построить мир — насытить кадры второплановым действием, чтобы действительно погрузить зрителя в эпоху.
8. Музыки в картине не много благодаря насыщенному звуковому фону, и она старается быть средневековой, а не стандартной голливудской.

** Marriage Story, 2019. Ren vs Romanoff

En fait le film de Noah Baumbach est consacré au divorce plutôt qu’au mariage. Charlie Barber (Adam Driver) est un réalisateur de théâtre new-yorkais dont la femme Nicole (Scarlett Johansson) a quitté Los-Angeles pour travailler et habiter avec Charlie. Après huit ans du mariage Nicole réalise qu’elle veut être indépendante et faire sa carrière de la réalisatrice sans son mari autoritaire. Il n’y aurait pas de problèmes si les Barbers n’avaient pas un garçon de sept ans Henry (Azhy Robertson) qui devient la pomme de discorde et presque la seule chose qui peut être divisée parmi les ex-conjoints. Nicole a déménagé à sa mère à Los-Angeles et elle s’arme des services d’une avocate très agressive Nora Fanshaw (Laura Dern) qui initie un procès judicaire. Charlie qui pensait naïvement que c’était possible de trouver une solution pacifique doit aller à Los-Angeles et embaucher aussi un avocat.

Marriage Story 2019
Les temps changent. Jadis un drame judiciaire «Kramer vs Kramer» est devenu le film le plus profitable de l’année aux États-Unis. Maintenant les drames familiaux ne peuvent pas faire la concurrence aux films de super-héros (où les deux acteurs principaux jouent activement). Vers le dixième minute on comprend que c’est le réalisateur qui a écrit le scénario. Vers le quinzième minute on comprend qu’il n’y a pas de travail de l’ingénieur du son — presque tout le son est synchrone et de plus il n’y a pas de musique. Faute de travail expressif avec le son et l’image, les acteurs deviennent la base du film. Adam Driver, un homme réservé combat avec obstination pour le fils contre Scarlett Johansson qui pleure trop. Il étoufferait sa femme pas son autorité sans Lora Dern — une femme très dégagée et sûre de soi — le personnage le plus éclatant dans ce film. Charlie n’a pas de proches et la mère et la sœur de Nicole sont très comiques. La chose la plus intéressante concernant l’ensemble des acteurs c’est la passivité et la tranquillité de Henry. Il n’a ni de crise de nerfs ni d’émotions fortes. De surcroît, et c’est très significatif — pour les parents Henry est presque l’objet, la chose de statut. Ils sont prêts à le déchirer en deux pendant le procès mais l’enfant de presque huit ans ne sait même pas lire ! L’infantilisme et l’amour-propre — c’est les problèmes les plus importants des héros. Et bien sûr — le système judiciaire américain qui est la cible de la satire de l’auteur. N’ayant pas ni désir ni pratique de pourparlers, les ex-conjoints ont dépensé d’énormes sommes d’argent pour garder leur indépendance financière et partager Henry, qui est resté un objet, 55 sur 45. La seule victoire éphémère dans cette bataille — c’est la carrière de réalisatrice commencée pour Nicole, mais elle n’est pas le héros principal de ce film. Quant à Charlie, la bataille lui a ouvert les yeux, il a gagné beaucoup d’expérience et la compréhension tardive des sentiments des autres. Pourrait-il en profiter davantage ? C’est la question. Valait-il des centaines de milliers de dollars et une psyché mutilée d’un enfant ? C’est l’autre question. Ce théâtre en conserve devrait-il être trente minutes plus courtes ? C’est la troisième question mais on ne la posera pas — après «The Irishman» également tourné par Netflix, c’est inutile.

*** Silence, 2016. Il n’est de mot que dans le silence

Silence 2016
Après «The Wolf of Wall Street» — une comédie délurée — Martin Scorsese a porté les yeux sur un sujet plus spiritualiste. Il est venu de la représentation d’un pécheur endurci à celle d’un homme juste. «Silence» est un film historique dont l’action prend place au Japon au début du XVIIe siècle. À cette époque-là le christianisme était interdit au Pays du soleil levant et le père Ferreira (Liam Neeson), le dernier prêtre catholique au Japon, a abjuré sa foi catholique après les tortures et les meurtres de ses disciples. En apprenant cette nouvelle, deux jésuites portugais jeunes, Sebastião Rodrigues (Andrew Garfield) et Francisco Garupe (Adam Driver), partent de Macao au Japon pour trouver et sauver le père Ferreira. Deux pères débarquent près d’un petit village Tomogi dont les habitants sont chrétiens clandestins. Malheureusement un inquisiteur Inoue (Issei Ogata) y arrive et il prend quatre otages parmi les villageois. Ils doivent piétiner une image de Jésus (un fumi-e) et ils font ça sur les conseils du père Rodriguez. Mais après cette formalité Inoue leur propose un test plus difficile — de cracher sur une croix de bois. Trois otages se renoncent et ils se font brûler. Seulement Kichijiro (Yōsuke Kubozuka), le guide des héros qui a déjà abjuré une fois, répète son acte impie. Suite à cette tragédie (tous les villageois étaient les témoins à l’exécution) les pères se séparent pour éviter l’inquisition.
À partir de maintenant nous restons avec le père Rodriguez. Il retrouve Kichijiro et il accepte sa pénitence juste pour être bientôt trahi par le japonais. Capturé par les inquisiteurs, Sebastião Rodrigues regarde la mort de Francisco Garupe qui essaie de libérer quatre chrétiens noyés. Ensuite le héros du film est ensuite emmené dans un temple bouddhiste, où Inoue et le père Ferreira qui a changé la religion et le nom essaient de convaincre le prisonnier de laisser ses tentatives de baptiser le Japon parce que «c’est un marais ou toutes les racines se dessèchent». Le père Rodrigues refuse et commence à préparer au tortures et au baptême du sang. Mais le portugais n’a pas mesuré la perfidie japonais — au lieu du père Rodrigues Inoue torture les chrétiens japonais qui ont déjà abjuré. Aussi Sebastião Rodrigues piétine-t-il un fumi-e et ensuite il change son nom et marie la femme japonaise. Après beaucoup d’années de la vie bouddhiste immaculée sous la surveillance infatigable de l’inquisition, Sebastião Rodrigues meurt et est brûle avec un crucifix caché dans les mains qui a été mis par sa femme.

Silence 2016
Ayant montré le Dieu sous l’apparence où il est apparu une seule fois («The Last Temptation of Christ») Scorsese essaie de montrer le Dieu de notre vie ordinaire — le Dieu invisible et inaudible. C’est une décision principale pour le réalisateur qui a voulu pendant la jeunesse de devenir un prêtre catholique. Scorsese a pris le titre d’un film de Bergman qui essayait pendant toute sa vie de surmonter le silence du Dieu. «Silence» nous renvoie aux films des années 1950-1960, des films du réalisme théologique. Bien sûr le réalisateur nous rappelle non seulement le cinéma européen mais aussi le cinéma japonais. C’est presque impossible pour un cinéphile de tourner un film sur le Japon en n’utilisant pas les images qui viennent de films d’Akira Kurosawa (e. g. le tribunal) ou Kenji Mizoguchi (un bateau dans le brouillard). Le point de vue de Scorsese est strictement réaliste (sauf la vision de l’image du Christ dans l’eau). Son montage voyante et ses mouvement du caméra prétentieux ont cédé leur place au point de vue statique. Les couleurs éclatantes se sont disparus et il en reste seulement trois — le vert des broussailles qui cachent les missionnaires, le bleu de la mer qui entoure ce pays imprenable et l’orange du feu qui éclaire des services divines clandestins et ensuite dévore des chrétiens. Le film presque manque du rouge, le couleur du sang, non seulement parce que les japonais préfèrent de brûler et noyer les martyrs pour priver les chrétiens de leurs os, mais parce que le réalisateur ne veut pas marteler le sujet des souffrances physique, préférant de porter l’accent sur la souffrance spirituelle.
Deux acteurs aident à Scorsese de transmettre les doutes de foi. En passant le temps de préparation dans les jeûnes et les prières Andrew Garfield a presque réussi de se délivrer du vernis hollywoodien. Quant à Adam Driver, dès les premières images du film il ressemble à un moine des peintures anciennes. En plus, les acteurs japonais trouvés pas Scorsese ont l’air authentique et en voyant le film on peut croire se déplacer au Japon du XVI-me siècle, au temps de la misère et des bagarres cruelles. Le point du vue de Scorsese sur le Japon est sévère, comme sur «Sansho the Bailiff» de Mizoguchi. Les paysans tourmentés par les travaux obligatoires durs et n’ayant pas de joie, perçoivent la vie dans l’au-delà chrétiens comme le dernier espoir et seulement les actions trop cruels des inquisiteurs peuvent casser ce barre. Mais le film n’est pas consacré au recouvrement de fois par les japonais. Le film est plutôt consacré à la perte de la foi par le héros principal. Au début il se sent comme un apôtre — il est prêt à aller dans le pays lointaine et très dangereux pour sauver son frère, pour donner la communion aux chrétiens clandestins et pour mourir pour le Christ si besoin. Chaque chemin d’un saint, c’est un chemin de doutes et faiblesses. Tel est même celui du Christ sans oublier le saint Pierre. Scorsese tourne une hagiographie et selon les canons il doit conduire son héros par ce chemin dur et cruel. Sebastião Rodrigues voit la puissance de foi incroyable des paysans qui sont prêts à mourir comme les premiers chrétiens, mais le moine ne voit pas le soutien du Dieu qui contemple la situation sans donner le moindre signe. Le paysage mort de ce pays sauvage n’écoute pas les voix de la prière. Il semble que le Dieu chrétien oublie vraiment ses fils au Japon. Scorsese montre le pire test de foi — l’épreuve de désespoir quant le prêtre doit continuer son chemin sans avoir le soutien du très Haut. De plus, on force Sebastião Rodrigues de mettre sur un plateau de balance son âme et son sauvetage et sur l’autre — les corps souffrant des japonais. À la fin il doit sacrifier son âme immortelle en abjurant pour arrêter les cris des martyrs et pour constituer le silence, dans lequel pour la première et dernière fois dans la vie il entendra la voix du Dieu.
Les voies de Dieu sont impénétrables. Parfois la persévérance de foi de martyrs provoque la diffusion de la religion. Parfois l’abjuration n’est qu’une formalité et on doit comprendre que sur une île isolée c’est impossible de sauvegarder le christianisme sans l’abjuration formelle car la foi vit dans le cœur. Saint Pierre a abjuré trois fois tandis que le héros de Scorsese l’a fait seulement une fois. Il a gardé la vie, il a gardé la foi et il l’a transmit à sa famille malgré la surveillance. Et malgré l’isolation du Japon et les répression, plus de 20000 chrétiens ont survécu à la liberté religieuse. Plusieurs parmi eux ont dû piétiner le fumi-e pour abjurer formellement. Aujourd’hui, à l’époque paisible, Scorsese tourne ce film pour formellement confirmer sa foi et pour nous donner une leçon aussi importante que belle.