*** House of Gucci, 2021. Lady Macbeth du district de Milan

Ridley Scott a consacré son dernier projet à la maison de mode Gucci et à l’histoire de guerres féodales autour de la marque. Le premier pas vers la chute était une rencontre dans une boîte de nuit Maurizio Gucci (Adam Driver) avec une Italienne très passionnée et persistante — Patricia Reggiani (Lady Gaga). Rudolfo, le père de Mauricio (Jeremy Irons), un esthète sophistiqué avec une très bonne intuition, a refusé de bénir cette union, et Maurizio a été contraint de quitter sa maison riche et de prendre un travail comme ouvrier dans un dépôt de bus de son beau-père. Après le mariage inévitable, Patricia a commencé d’établir des contacts avec Aldo Gucci (Al Pacino), un frère de Rudolfo. En profitant de l’incompréhension et l’aversion mutuelles entre deux frères et entre Aldo et son fils Paolo (Jared Leto), Patricia a vissé son mari dans le coeur de la maison de couture : très vite, il est devenu un gestionnaire supérieur à New-York chez son oncle. Avec les mains de Paolo, Maurizio envoye Aldo en prison, et suite à la morte de Rudolfo, le héros principal devient le seul propriétaire de l’entreprise. Ici commence le deuxième et très court chapitre de la vie de Maurizio. À la recherche d’argent pour développer son entreprise, il se tourne vers des investisseurs arabes et rompt presque en même temps avec Patricia, réalisant qu’elle est sa Lady Macbeth. Dépourvu de talent managérial, Maurizio est contraint de vendre entièrement sa part aux Arabes, et très vite, il est tué par son ex-femme à l’aide de deux tueurs siciliens à cause de la jalousie et de l’avarice.
House of Gucci

Le réalisateur est un maître, un classique vivant. En racontant cette histoire presque entièrement composée de dialogues et donc ayant une limite mise en scénique, Ridley Scott se concentre plut tôt sur les acteurs. Le casting de film est incroyable – presque chacun est un lauréat d’Oscar (même pour une chanson) ou un lauréat futur (Adam Driver, sans doute). Ridley Scott a même trouvé la place dans cet ensemble pour l’épouse du propriétaire actuel de Gucci – François-Henri Pinault dont la femme Salma Hayek joue un rôle épisodique. Le seul problème du casting de quatre grands acteurs dans les rôles de Guccis et de Lady Gaga comme Patricia, un problème déjà beaucoup cité et noté, c’est manque de vrai ensemble. Tout le monde est bon, mais souvent tout le monde joue sa propre rôle. Lady Gaga est très excentrique et active – mais c’est exactement ce à quoi elle a droit par son rôle — une simple femme stupide qui a grimpé dans la haute société et dont les astuces simples ne la rendaient pas heureuse à long terme. La ligne de Rudolfo Gucci est marquée par la discrétion. Jeremy Irons passe la plupart de son rôle dans l’obscurité de sa villa. Un intellectuel et l’homme d’art mourant, une espèce menacée, un héros romantique («j’ai fait ce foulard pour Grace Kelly !») est une image fréquente de cet acteur. La seule scène où Irons exprime les émotions fortes, c’est un scandal avec Paolo qui a osé utiliser du marron dans ses dessins de vêtements. Assez curieusement, ç’a mis en fureur ce vieux Gucci bien plus que la fuite de son fils de la maison vers une niaise aux gros seins. L’ombre de Rudolfo est son avocat silencieux – Domenico De Sole joué par Jack Huston. Cet homme patient en noir deviendra éventuellement le PDG de la maison de mode après le départ de Maurizio. Adam Driver s’intègre dans ce film beaucoup mieux que dans «The Last Duel». Star Wars a déjà montré qu’il ne peut pas jouer les méchants. Dans «House of Gucci», le flegmatisme de l’acteur, son sourire ironique et son estime de soi intérieure, que Driver apporte à chacun de ses rôles, aide à Driver de devenir le vrai centre du film, un personnage beaucoup plus complexe que celui de Lady Gaga qui crée une image réaliste, authentique et vive, mais plate. La ligne d’Aldo est plus excentrique, surtout Paolo Gucci. Jared Leto, un fan de Gucci dans la vie ordinaire, comme d’habitude, il veut plus que tout que tout le monde voie comment il joue. Son dessin du rôle avec un maquillage complexe et beaucoup d’émotions jouées devient plus important pour l’acteur que le personnage lui-même, qui finit par rejouer gravement et s’envole de l’ensemble (ce rôle a causé le plus de plaintes des vivant Guccis). Quant à Al Pacino, l’acteur le plus grand de ce casting nous donne non seulement l’image d’un homme d’affaires sûr de lui, le rôle ordinaire pour lui, que Al Pacino peut jouer même sans se réveiller. Al Pacino est presque le seul acteur dans le film qui joue la vrai tragédie, une tragédie shakespearienne. Dans cette intrigue sur la lutte pour le pouvoir et l’argent, c’est lui qui est la principale victime de l’intrigue. L’acteur se montre très clairement la victime de la trahison, quoique brièvement (dans «The Irishman», par exemple, son personnage n’a aucun temps de comprendre quoi que ce soit).
Dans l’interprétation de Ridley Scott, l’histoire de Gucci est l’histoire de Macbeth. Le scénario a diminué gravement la quantité de Guccis (en réalité, Aldo avait quatre enfants, Maurizio, deux), et l’histoire a été simplifiée. Ridley Scott raconte une histoire d’une femme obsédée par une passion pour l’argent, qui a utilisé son mari faible pour les intrigues, et a finalement presque rien reçu. À proprement parler, Patricia a perdu beaucoup d’années de sa vie dans la prison, mais elle est libre maintenant et plus riche qu’avant son mariage à Maurizio. Ce drame est sérieux et joué par des gens respectables, donc Ridley Scott limite les images ensoleillées de dolce vita italienne. Souvent, on voit des intérieurs semi-obscurs des maisons de Rudolfo et Maurizio. En même temps, Ridley Scott est à un pas du style d’un film mafieux comme «The Godfather» (à l’exception d’une scène avec une vache, un hommage pur à Coppola). Les tons froids et gris remplacent peu à peu le soleil des premières scènes. Les costumes de ce film sont très beaux et variés (jusqu’au niveau de Wong Kar-wai – nouveaux vêtements dans chaque plan même au sein d’une scène dramatique cohérente), mais il n’y a pas de couleurs chics de Gucci moderne, seulement les costumes classiques et réservés (sauf pour la roturière Patricia). Dans le monde de Guccis, il n’y a pas de chaleur et de la lumière du foyer (c’est très ironique que la cheminée n’apparaît que dans les scènes d’aliénation des époux), parce qu’il n’y a pas de la famille. Le nom et le statut sont bien plus importants pour les créateurs de mode que les vrais liens et valeurs familiaux. Et la phrase «aucun membre de la famille Gucci ne reste dans l’entreprise» devient la principale leçon que l’auteur veut nous transmettre.

Тезисно:
1. Рассказ истории об убийстве Маурицио Гуччи его бывшей женой построен преимущественно на диалогах.
2. В данных условиях, Ридли Скотт старается сосредоточиться на актёрах, так как мизансценически его фильм довольно ограничен.
3. Кастинг фильма прекрасен (почти сплошь одни лауреаты премии Оскар), но каждый актёр играет какую-то свою роль. И если эксцентризм Леди Гаги драматургически оправдан (простушка, которая попыталась влезть на самый верх), то например, Джаред Лето играет очень нарочито и переигрывает (именно его роль больше всего критиковали оставшиеся в живых Гуччи).
4. Аль Пачино и Адам Драйвер прекрасны и на своём месте. Пачино дали сыграть трагедию предательства, которую он не сыграл только что в «Ирландце».
5. Сюжет борьбы за модный дом упрощён и превращён в современное подобие «Леди Макбет» с трагедийным финалом, когда в итоге никто не получает ничего.
6. В фильме довольно мало солнечных пейзажей и ярких костюмов. Историю кровавой борьбы за власть Скотт рассказывает в полутёмных интерьерах вилл, где действуют одинокие холодные персонажи, лишённые крепких семейных связей. Фамилия для них важнее реальной семьи, что и приводит к трагедии.

** Dune, 2021.

Une quarantaine d’années après l’échec de David Lynch, Denis Villeneuve a essayé d’adapter au grand écran le roman éponyme célèbre de Frank Herbert. L’action se déroule dans un futur lointain. Le duc Leto Atréides (Oscar Isaac) devient un gouverneur de la planète Arrakis ou Dune. Cette planète est très importante pour l’Empire transgalactyque à cause de grands vers produisant «l’Épice», une drogue indispensable pour les voyages interstellaires. Bientôt, l’Empereur Shaddam IV a envoyé sur Dune ses légions pour aider à baron Vladimir Harkonnen (Stellan Skarsgård) d’écraser la maison d’Atréides. Le duc et ses gardes sont tués, mais son fils Paul (Timothée Chalamet) et sa concubine Jessica (Rebecca Ferguson) se cache dans les déserts de Dune avec les peuple autochtone de cette planète, les Fremen, qui prennent Paul pour l’Élu des anciennes prophéties. À suivre…
Dune 2021

La première chose qui doit être prononcée juste au debut d’une conversation sur «Dune», c’est le fait que le film de Villeneuve n’est pas un film complet à valeur requise. On doit le considérer juste comme un tiser, une exercice de style, des tests d’écran. La super-tâche de Villeneuve, qui est un fan du roman depuis sa jeunesse, est sans doute non seulement de créer le film sur Dune, mais de créer le monde de Dune et y habiter aussi longtemps que possible, juste comme Alexeï German pendant le tournage de ses deux derniers films. Le processus est beaucoup plus important pour le réalisateur qu’un résultat. C’est pourquoi le film est longue et lent comme une série, c’est pourquoi on a l’intention de créer au moins deux films.
Le matériel du roman s’est avéré plus grand est sérieux pour les ambitions de Villeneuve. Malgré la vitesse baisse de narration, les pensées globales d’Herbert sur la politique, le pouvoir, l’écologie ont enfui le film. En effet, c’est une situation ordinaire pour les adaptations de grands romans et une situation attendue, vu que Villeneuve est plutôt le réalisateur de petite forme. Ce qui est bien pire, c’est la perte d’émotions dans le film. Le laconisme émasculé de la représentation visuelle, dont nous parlerons bientôt, a également affecté le jeu d’acteurs et les images des personnages. Presque tout l’ensemble des acteurs joue non seulement avec réserve, mais aussi d’une manière très stéréotypée, soit un monarque sage d’Isaac, le méchant principal de Skarsgård, un guerrier courageux de Momoa etc. C’est un ensemble de stéréotypes appropriés dans Star Wars, mais pas dans un film qui prétend être de la science-fiction intellectuelle (et il ne peut en être autrement, car Villeneuve, malheureusement, ne sait pas tourner les scènes de bataille et d’action). Bien que le talent de Skarsgård soit incomparable à celui de Kenneth McMillan, le baron de 2021 est incomparablement plus ennuyeux que celui de 1984. Vu que tous les acteurs sous-jouent, un jeu émotionnel sur le point d’hystérique de Rebecca Ferguson semble très «trop» dans ce film. Quant à Timothée Chalamet, il n’a ni force intérieur ni talent pour jouer un messie. Il juste joue un personnage qui ne peut que prétendre d’être lui depuis le vrai début de film. C’est triste que Keanu Reeves est vieux aujourd’hui, parce qu’il a toujours réussi à jouer les rôles d’élus.
Qu’est que le film, privé dans sa narration de l’amour, de l’humeur, du suspense, de la peur, de toutes les émotions fortes (l’une scène de Lynch où le baron boit le sang d’un jeune homme, malgré le jeu très non naturel de deuxième plan, est plus interessante et émotionnelle que tout le film pris en considération), peut nous donner ? La beauté. Pas la beauté d’un désert comme quelqu’un écrit, parce que le désert d’Arrakis est mort et sombre. Si vous voulez de voir un désert vraiment cinématographique, il faut regarder «The Sheltering Sky» de Bernardo Bertolucci ou «Mad Max: Fury Road» de Georges Miller. La beauté de style laconique sur tous les niveaux de la direction artistique. Les paysages rocheux vides riment avec d’immenses salles vides, rappelant toujours des grottes. La couleur des décors et des costumes (il n’y a pas tout à fait du baroque lynchien) s’accordent parfaitement à la moindre nuance et forment une palette détaillée, construite sur seulement deux couleurs : le jaune et le gris. Bien que l’espace de l’écran est plat et unidimensionnel comme d’habitude dans le cinéma de grand public hollywoodien, la photographie de Greig Fraser est incroyable beaux. Je ne me souviens pas un film où le chef opérateur travaille si bien avec des objets hors la zone de mise au point de l’objectif et utilise si bien l’image floue en raison de l’utilisation d’hologrammes, de boucliers protecteurs, d’ailes d’ornithoptères, ou du fait que les personnages sont cachés par une tempête de sable.
C’est à dire, «Dune» n’est pas un film pour réfléchir ou sentir (pas pour écouter non plus, parce que la musique de Zimmer est très de fond et ordinaire et le niveau de sons est pauvre), c’est un film pour voir et regarder.

1. «Дюна» Вильнёва не является полноценным фильмом, и не должна таковым восприниматься. Это скорее тизер и упражнение в стиле.
2. Сверхзадача обожающего роман режиссёра — создать себе мир «Дюны» и пожить в нём как можно дольше за счёт студии WB. Отсюда общая медитативность и пейзажность картины.
3. На уровне production management фильм очень цельный — идеально выверенная лаконичная палитра тусклого жёлтого и насыщенного серого. Полный минимализм, корабли самых простых геометрических форм и отсутствие яркого барочного стиля, который местами пытался создать когда-то Линч.
4. Абсолютно завораживающая работа оператор Грега Фрэйзера. Как всегда в Голливудском мейнстриме, здесь нет глубокого многопланового пространства, но как Фрэйзер работает с зонами нерезкости! Я давно не видел фильма, где так красиво умеют использовать расфокус и общую размытость кадра.
5. Пейзажи хороши, но они очень сдержанно сняты. Пустыня здесь, как и полагается, абсолютно мёртвая, без души. Хотите красивую пустыню — смотрите Бертолуччи или Миллера.
6. На этом фоне работа со звуком очень и очень скромная, а музыка Циммера скорее фоновая и не запоминается.
7. Материал, конечно, оказался слишком серьёзным для Вильнёва. В итоге даже при обилии диалогов (от этого трудно избавиться) и почти сериальном темпе пропадают политические и прочие экологические подтексты Герберта.
8. Также не хватает эмоционального наполнения. Актёры очень сдержанно играют и, скорее недоигрывают или играют шаблоны (мудрый сказочный царь Оскар Айзека). В итоге эмоциональная игра Ребекки Фергюсон смотрится как жуткое переигрывание. Что касается Тимоти Шаламе, то, простите, но он лишь играет человека, претендующего на статус избранного, причём с первого кадра. У него в силу возраста или ещё чего-то нет внутренней силы. Жалею, что Киану Ривз стар, чтобы сыграть Пола. У него такие роли очень хорошо получались.
9. В фильме нет любви, нет саспенса, нет ярких батальных сцен (Вильнёв их не умеет снимать), нет подлинных эмоций. Это тоже элемент стиля, но для меня одна сцена у Линча, когда барон пьёт кровь юноши, при всей наигранности второго плана, более эмоциональная и сильная, чем весь фильм Вильнёва.

*** 1917, 2019. Cours, le caporal, cours !

1917 2020 Sam Mendes
Selon le titre le huitième film de Sam Mendes est consacré à la Première Guerre mondiale. L’intrigue se déroule sur environ vingt-quatre heures de la vie du caporal William Schofield (George MacKay) qui doit étant accompagné par le caporal Tom Blake (Dean-Charles Chapman) distribuer d’urgence un ordre du général Erinmore (Colin Firth) au colonel MacKenzie (Benedict Cumberbatch). Le chemin passera par un no man’s land — le territoire juste laissé par les Allemagnes. Théoriquement il n’y a pas d’ennemi, mais qui sait quels dangers attendent les soldats. L’ordre doit être distribué vers le matin, parce que le colonel MacKenzie va commencer une contre-attaque, ne sachant pas que la retraite des Allemagnes est la partie d’un plan réfléchi il y a longtemps. En route la perte d’un camarade, un sauvetage d’une bébé et quelques échauffourées avec l’ennemi attendent notre héros.

1917 2020 Sam Mendes
Cinématographe, cinéma, kínēma (du grec) : le film, c’est un mouvement par sa nature. Réalisant ça, Sam Mendes a tourné un film n’ayant que le mouvement. La forme est très simple : un chemin du point A au point B. On peut nommer peu de films avec tel sujet. Même dans «Mad Max: Fury Road», composant aussi seulement du mouvement, il y a un retour. Même dans «Le salaire de la peur» il y a un moment de retour bien que très-très court. Chez Sam Mendes il n’y a pas presque de pause — la circulation commence dès le vrai début du film et nous captive et capture. C’est un forme cinématique facile à regarder et en même temps très difficile à tourner, parce que pour un mouvement perpétuel Sam Mendes utilise la technique du plan-séquence, plus précisément de deux : avant et après la perte de conscience de William imaginée pour sauter la plupart de la nuit. Bien sûr dans un film de guerre cher et complique c’est très difficile d’appliquer cette technique et donc Sam Mendes et Roger Deakins utilisent le montage caché comme dans «The Rope» ou «Birdman». Oui, le film est très éloigné de l’élégance du film d’Iñárritu, de sa possibilité de presser le temps et de saturer le film par les connotations. À la guerre il n’y en a pas, les dernières, — tu dois atteindre l’objectif, tu dois aider aux Français et tu dois tuer les Allemagnes qui n’évaluent pas la miséricorde. Le sujet est très simple, mais justement sa simplicité nous permet nous donner à cette attraction formaliste. Le style de Mendes qui est très proche aux jeux vidéo (ce n’est pas par hasard que le film est tourné par le studio de Steven Spielberg) attire le public et met chaque spectateur dans la peau d’un soldat. C’est très significatif que la première large du film coïncide au centenaire de la promulgation du traité de Versailles – la vrai fin de la Grande Guerre.
Ici, le chemin est linéaire, les dialogues sont assez primitives, la musique modeste ne se tait que pendant la mort de Tom Blake et la rencontre avec son frère. Il semble que Sam Mendes ait décidé de tourner un film plus simple que ses films sur James Bond. En fait on doit chercher le grain de cet œuvre dans les deux choses — le jeu de George MacKay et le travail de Roger Deakins. George MacKay se personnifie dans un soldat ordinaire avec telle réalité et force qu’il est devenu un personnage hors de temps. Son image élancée peut être imaginée dans n’importe quelle guerre de l’Europe depuis le début du Moyen Âge — parfois il semble que son personnage soit venu dans le film d’une miniature médiévale ou d’une peinture du Greco. George MacKay, taciturne, pensif et persévérant rejoue très facilement tous les autres acteurs, même Benedict Cumberbatch, qui a joué son épisode si platement que vous ne croyez pas que ce soit lui. Si George MacKay est un acteur peu célèbre maintenant, le génie de Roger Deakins est très connu. L’un des (sinon le plus) directeurs de la photographie les plus talentueux dans le monde, pour lui, avec ses quarante ans d’expérience, c’est difficile de nous vraiment étonner, mais en tous cas il a créé l’image très digne. Cela s’applique non seulement aux mouvements de caméra bien réfléchis et impressionnants mais à la décision de couleurs. C’est incroyable, comment Roger Deakins crée au début du film l’image assez monochrome — il utilise seulement des nuances du brun poussiéreux de l’uniforme de soldat et juste un peu de gris. Ensuite, pendant la nuit on a plongé le héros dans l’enfer, dans le monde du feu et de l’ombre (un jeu de couleurs répété à la fin de «Skyfall»). À la lumière de l’aube le caporal traverse les eaux noires de Styx et au fur et à mesure que le héros approche aux soldats britanniques, le vert, le couleur de la vie, remplit l’image. Pour peu de temps à propos — l’attaque va commencer et le blanc deviendra le couleur dominant, le couleur de la mort qui entourera un brave caporal.
Mais la mort ne peut pas être la fin de cette histoire. À la fin du film nous voyons de nouveau la vie — William s’assied sous un arbre entouré par l’herbe ondulant. Dans ce moment du silence et la pacification Sam Mendes par un geste élégant transforme la ligne dans le cercle, parce que le film a commencé par l’image de William asseyant sous l’arbre, parce que la vie continue au-delà de la mort et parce que ce n’est pas l’histoire d’un soldat abstrait, mais celle d’un grand-père de Sam Mendes.

P. S. Le 6 avril 1917, la journée de l’action, est le jour d’entrée en guerre des États-Unis. Pas si simple comme dans «Dunkirk» mais la présence et le rôle des États-Unis est déposé.

*** Joker, 2019. Stand up — head up

Joker 2019
Ayant participé dans deux film sur Batman, Joker enfin a obtenu un film propre réalisé par Todd Phillips. Arthur Fleck (Joaquin Phoenix) travaille comme clown, habite avec sa mère et vit presque seulement dans le monde de ses rêves — la réalité est cruel et sombre, tandis que dans l’imagination Arthur est un comédien invité à l’émission de télé très populaire de Murray Franklin (Robert de Niro) et il a une liaison avec une jolie voisine solitaire. Un gars mince et craintif, Arthur est inscrit auprès d’un psychothérapeute. Suite aux coupes budgétaires le service d’aide psychothérapeutique est fermé et c’est seulement l’un des problèmes tombés sur la tête d’Arthur dans quelques jours. Arthur est frappé par les ados dans la rue, il perd son travail, perd sa mère et sa première performance comme comédien dans un club échoue. Pire que ça — quelqu’un envoie l’enregistrement de la performance d’Arthur à Murray Franklin qui se moque de lui et l’appelle Joker. Privé de médicaments, Joker commence à venger à toute la société pour sa vie inutile. Il s’avère que la violence est le chemin le plus facile pour Arthur pour prouver qu’il n’est pas nul, vu qu’un collègue lui a donné un jour un pistolet. En tuant trois mauvais garçons riches travaillant pour Thomas Wayne (le père de Batman) dans le métro, Arthur devient le porte-parole de la haine des pauvres contre les riches et son masque de clown devient le symbole de cette protestation. Étant donné que le masque est le seul indice, la police ne peut pas attraper le tueur. Resté libre, Arthur va à l’émission de Murray Franklin et après un court monologue tue son moqueur en direct provoquant une vague immense de violence qui noie la ville Gotham dans le sang et le feu.

Joker 2019
La nostalgie c’est l’un des vecteurs les plus importants du cinéma américain d’aujourd’hui. Deux exemples très significatifs de cette tendance ce sont «Once Upon a Time in Hollywood» et «The Irishman» qui rivalisent avec «Joker» pour l’Oscar du meilleur film. Le temps d’action de «Joker» est 1981 — la fin d’une décennie très orageuse quand la quantité d’assassinats a brusquement monté et les films cruels du Nouvel Hollywood ont rempli les écrans. C’est impossible de ne pas lier le film de Todd Phillips avec les films de cette époque-là. Parmi le cinéma de cette époque deux films viennent premièrement à l’esprit : «Death Wish» (1974) et «The King of Comedy» (1983). Il semble que les premiers meurtres commis dans le métro au moyen d’un revolver donné soient venus de «Death Wish» où un pacifiste joué par Charles Bronson ouvrit la saison de la chasse aux criminels pour le bonheur de tous les new yorkais ordinaire. Mais Paul Kersey, l’un des vigilants cinématiques les plus célèbres, aide la police à mettre de l’ordre dans la ville tandis que Joker la plonge dans le chaos et la violence. Ce n’est pas la différence des utiles c’est la différence des exécuteurs. Paul Kersey est un homme raisonnable conduit au désespoir, Joker est dès le début un psychopathe utilisant des antidépresseurs. Joker est une version plus grave de Rupert Pupkin et le film de Todd Phillips est inséparable de celui de Martin Scorsese. Rupert Pupkin joué par Rober De Niro était un fou qui rêvait de passer dans l’émission de Jerry Langford et à la fin il a obtenu ses dix minutes de la gloire. Pupkin n’a qu’un seul rêve et en réalité pas trop dangereux. Il n’est pas intéressé par la situation qui l’entoure. On peut vraiment imaginer que Murray Franklin joué par Rober De Niro lui-même, un comique qui n’est pas très talentueux, c’est Rubert Pupkin après une bonne trentaine d’années. Maintenant un autre comique de stand-up raté grandit. Celui qui veut non seulement assister à l’émission mais aussi faire un geste cruel exprimant le désespoir des couches inférieures. Joker devient le nouveau messie, le messie toujours plus proche aux gens ordinaires que son adversaire éternel — Batman (on voit ça clairement dans les films de Christopher Nolan).
Le succès festival de «Joker» et «The Shape of Water» montre la puissance du cinéma de genre moderne et le changement d’échelle des valeurs dans le septième art. Le succès festival de «Joker» et «La vie d’Adèle» prouve qu’aujourd’hui les band-dessinés sont quelque chose plus grande et significatif qu’un divertissement pour les adolescents. C’est évident que sans utilisation de la marque «DC» et le nom de l’ennemi juré de Batman l’histoire d’un autre guignard ne sera pas si populaire. Mais même la plaque signalétique de «DC», est-ce qu’elle peut expliquer un milliard de dollars de frais de cinéma ? Il y a quelques autres éléments qui rend le film attrayant pour le grand public. «Joker» est tourné très traditionnellement et le scénario linéaire est écrit par l’un des zombies (j’utilise le mot de Charlie Kaufman) qui ont assisté à l’un des master-class de Robert McKee et mémorisé le mot «l’événement induisant» (il y en a beaucoup : l’humiliation, le chômage, la mort de la mère, manque des tablettes etc.). Le jeu de Joaquin Phoenix — c’est vraiment une seule pierre précieuse dans le film. Une autre réincarnation magnifique de cet acteur qui devient de plus en plus fort au fil du temps est le plaisir cinématographique incroyable et un exploit d’acteur. Mais honnêtement cela peut ne pas suffire. Peut-être la force de «Joker» c’est la possibilité de saisir le zietgeist, les vraies pensées dans les têts des gens qui s’enfuient la réalité aux séances de Marvel mais dans la profondeur de leurs cœurs ils veulent changer la réalité à la manière d’Arthur Fleck.