В прошлом году Энг Ли зачем-то снял совершенно необязательный в его богатой карьере боевик для Джерри Брукхаймера под названием «Гемини» с двумя Уиллами Смитами — 50-летним и 20-летним.
Интересно то, что именно на этом фильме Энг Ли решил попробовать себя в роли Абеля Ганса — бога кино, который находится на шаг впереди мирового кинопрогресса. Амбициозный Абель Ганс для фильма «Наполеон» придумал широкоэкранное кино за 26 лет до его полноценного внедрения. Фактически, фильм Ганса нигде нельзя было нормально посмотреть в авторской версии.
Энг Ли снял фильм на цифровую камеру с разрешением 4K, в 3D и на скорости съёмки 120 кадров в секунду. Ирония заключается в том, что НИ ОДИН кинотеатр в мире не мог (и до сих, я подозреваю, не может) показать этот фильм в авторском замысле. И было лишь 14 кинотеатров на все США, которые были готовы показать фильм хотя в два раза меньшем разрешении 2K.
Метка: USA
Useless fact about USA literature
Бесполезный факт — известно, что в США почти не смотрят фильмы на других языках и не делают дубляж, но ещё интереснее тот факт, что англоязычные страны (UK, USA) настолько самодостаточны в культурном плане, что точно также абсолютно игнорируют любую переводную литературу. Из 5000 самых читаемых книг в Англии в 2014 году переводных было 2.1 процента! В США в последние годы это число находится где-то в районе 3-5%.
USA-Europe cinema differences
Любопытная деталь — в США в кино в 30-е свистом выражали удовольствие от просмотра, в Европе — негодование.
**** Nashville, 1975. Une chanson sans héros
Est-ce que ce possible de décrire très brièvement le sujet de l’onzième film de Robert Altman ? Les vies de 24 personnages s’entrelacent en peloton serré dans la capitale de la musique country – la ville Nashville. Quelqu’un, comme Tom Frank (Keith Carradine) ou Martha (Shelley Duvall), essaye d’enrichir sa vie sexuelle à l’aide de partenaires occasionnels. Quelqu’un, comme un chanteur Haven Hamilton (Henry Gibson) essaye de réaliser ses ambition politique. Quelqu’un, comme Barbara Jean (Ronee Blakley), veut juste chanter pour ses fans, mais est forcé de passer la plupart du film dans le lit. Quelqu’un, comme Winifred (Barbara Harris), a du talent à chanter, mais a besoin de chance pour se faire connaître. Quelqu’un, comme Sueleen Gay (Gwen Welles), n’a pas de talent, mais est prêt à aller à toute humiliation pour monter sur scène. Certains personnages ont des tâches très simples : de mener adéquatement sa femme dans le dernier voyage (Mr. Green joué par Keenan Wynn), de tuer une star pour devenir célèbre (Kenny Frasier joué par David Hayward) ou simplement d’assister à un concert de Barbara Jean (Pfc. Glenn Kelly joué par Scott Glenn). Enfin nous avons une journaliste Opal (Geraldine Chaplin) qui essaye de trouver l’essence de Nashville en tournant le film documentaire pour BBC et Tricycle Man taciturne (Jeff Goldblum) qui n’est nécessaire que pour créer des connecteurs narratifs.
C’est incroyable, mais Robert Altman, le seul lauréat américain de trois prix majeurs de trois festivals européens les plus grands, n’a obtenu aucun prix majeur pour son meilleur film, pour son magnum opus. De comparer «Nashville» à la plupart de grands films, c’est de comparer «Le Combat de Carnaval et Carême» par Pieter Brueghel à «La Joconde». Très peu de films peuvent nous donner telle immense peinture de la vie et encore moins de réalisateurs peuvent tourner ce tableau. Manque de héros principal donne à Altman la possibilité de se concentrer sur la société dans son ensemble tandis qu’un script fort et cohérent ne donne pas au spectateur la possibilité de s’ennuyer. Seulement à première vue «Nashville» ressemble à une longue comédie musicale consacrée à la musique country et aux affaires de cœur. La célébration du bicentenaire des États-Unis à venir incorporée dans le sujet et réclamée dès les premières images, couplées avec le drapeau des États-Unis en plein écran en finale du film indiquent clairement un niveau élevé de prétentions de l’auteur. «Nashville» n’est pas une satire sur les chanteurs amateurs, «Nashville» est une satire sur toute la population du pays, une sorte de résumé de l’histoire du bicentenaire d’un État démocratique et multinational. Dans ses films plus ou moins polyphoniques Altman se moquait toujours de quelque chose : les relations sexuelles et l’institution moderne du mariage dans «Short Cuts», Hollywood dans «The Player», le monde de la mode dans «Prêt-à-Porter». Mais jamais Altman a pris une telle échelle comme dans «Nashville» où l’auteur mélange telle quantité de personnages : du candidat à la présidentielle (qui n’est jamais vu par le spectateur !) à un chanteur – hommes à succès, d’une serveuse à une vedette de la scène. En dessinant le pays de vanité où la taille de sein peut être plus importante que le talent et la participation à une chorale chrétienne n’empêche pas l’adultère, Altman ne même prétend pas d’avoir un point de vue neutre. «Nashville» est une satire convenablement mordante, réussie précisément parce que Altman ne se concentre pas sur une histoire privée mais nous offre un regard polyphonique.
Le style de réalisation permettant à Altman de créer cette polyphonie est complexe et unique. Pour transmettre la réalité pseudo-documentaire le réalisateur donne beaucoup de liberté aux acteurs qui peuvent développer leurs personnages eux-mêmes, improviser les dialogues et écrire les chansons. Les dernières prennent environ 50 minutes de temps d’écran mais ces chansons amateures ne sont pas ennuyeuses du tout, parce que premièrement chacune devient une caractéristique de personnage et deuxièmement Altman profite des chansons pour nous donner une galerie des portraits de spectateurs qui lui permettent d’étendre la couverture au-delà des personnages principaux. «Nashville» est un film trop volumétrique pour que l’on puisse le comprendre dans une vue. Altman jongle avec deux volumes cinématique – celui-ci du son et celui-ci de l’image. 24 (25 avec le candidat à la présidentielle qui n’est pas visible mais audible) personnages ne seulement créent eux-mêmes un monde polyphonique mais de plus ils parfois parlent en même temps. Bien-sûr, Altman utilise le son multicanal qui va révolutionner le cinéma dans les années 1970. Au niveau de l’image le réalisateur a deux instruments principaux : le zoom et le format écran large. Le premier permet de montre que chaque détail est en réalité une partie intégrale d’un tableau plus large (comme d’habitude Altman utilise zoom-out dans «Nashville», allant du privé au général). L’écran large peut être rempli par la multitude de personnages aux niveau différents de mise-en-scène. Cette technique nous force à constamment faire notre choix parce qu’au cinéma nous ne pouvons ni écouter deux personnages en même temps ni les suivi nos yeux. Cependant, cela ne suffit pas pour un réalisateur inventif et courageux. De plus Altman utilise activement les miroirs et les verres non seulement pour séparer les spectateurs des personnages et créer un volume spatial mais aussi pour créer les images ou les espaces se superposent si fortement qu’il est très difficile parfois de comprendre la mise en position scénique des personnages (e. g. la scène première dans un studio d’enregistrement qui vaut tout le film).
Au niveau du langage de cinéma Altman nous montre l’inconnaissabilité du monde dans son intégralité, mais on peut toujours du moins essayer de s’approcher de cette frontière en restant dans le cadre d’un seul film, pas vrai ?
** Marie Antoinette, 2006. La reine maudite
Le titre du film parle de lui-même – l’œuvre de Sofia Coppola est consacré à la dernière reine maudite de la France. Le film suit attentivement les premiers événements de la vie de la princesse autrichienne Marie Antoinette, née Maria Antonia, (Kirsten Dunst), qui ayant seulement 14 ans était mariée au futur roi de la France Louis XVI (Jason Schwartzman). D’abord la vie de dauphine était très difficile – privée de toutes ses choses autrichiennes y compris son chien préféré, Marie se trouve dans le monde de l’étiquette stricte et pas naturelle. Le mari ne s’intéresse pas à sa jeune femme à laquelle il préfère la chasse. La mort de Louis XV (Rip Torn) soulage la vie de Marie Antoinette – étant la reine elle peut maintenant licencier des demoiselles d’honneur strictes et se plonger tête baissée dans la belle vie de toilettes et gourmandises pour faire passer l’amertume de l’absence de la vie sexuelle. Quand sept ans après la rencontre, le roi enfin fait la consommation du mariage (à l’aide des conseils de Joseph II (Danny Huston) – le frère de Marie), Marie était déjà tellement éloignée de la vie de son pays qu’elle n’a pas noté le moment quand elle l’a perdu.
En fait une revue très précise et laconique a été déjà écrite par Alex Masson sur Score : «un numéro spécial de Vogue consacré aux coulisses de Versailles». Il y a vraiment des films où l’ambiance est plus importante que le sujet. Le dernier se développe ici de façon exponentielle — les quatre premières années de Marie Antoinette en tant qu’épouse sont étirées pendant plus qu’une heure, tandis que les dernières quinze années parcourent en 55 minutes, comme si on essaye de trouver les raisons du triste échec au début du voyage. Marie Antoinette, peut-elle gouverner son pays ou le sauver ? Non, et elle définitivement n’essaye pas. Sofia Coppola, peut-elle recréer dans son film la vraie vie de la reine avec les détails historiques ? Non, et elle définitivement n’essaye pas. C’est très difficile de jouer sur le terrain de Kubrick à l’ère postmoderne même ayant Milena Canonero dans l’équipe. Il y a longtemps jeune Milena Canonero a gagné son premier Oscar pour les costumes dans le film «Barry Lindon». Alors elle a créé les costumes de XVIIIe siècle historiquement très précis. Maintenant, en travaillant sur l’autre film sur le XVIIIe siècle, elle donne la liberté à sa fantaisie et crée le monde seulement inspiré par l’époque de Louis XVI. Les couleurs roses très vivantes du décor, des vêtements et de la nourriture accompagnés par la musique moderne doivent rendre l’héroïne plus proche aux spectateurs d’aujourd’hui et montre le prix élevé de l’oisiveté et du gaspillage à l’époque du début de la fin de la monarchie. La beauté et la minutie de la création d’une atmosphère de cet opus visionnaire est charmante. Est-ce que la récitation de la vie d’une reine oisive et infantile doit être à son tour plus profonde qu’une série de tableaux inventives de garde-robes luxueuses anachroniques ? C’est l’autre question. Les lecteurs du magazine Vogue ont également aujourd’hui le besoin et le droit à leur propre vision de l’histoire.
*** Being There, 1979. Heureux les pauvres de cœur !
Le film de Hal Ashby est une adaptation cinématographique du roman «La Présence» de Jerzy Kosinski. Le héros principal est un jardinier de cinquante ans Chance (Peter Sellers) qui n’a jamais quitté une maison riche à Washington, qui n’a jamais rien étudié et pour qui la télé était le seul moyen de connaître le monde. Soudain son maître meurt sans laisser aucune note sur Chance. Jeté dans la rue par les nouveaux propriétaires de l’hôtel particulier, Chance parvient à emballer dans les luxueuses valises du défunt les vêtements de l’épaule du maître qui lui vont toujours en taille. En quittant la maison Chance se trouve dans un grand monde presque inconnu pour lui. Personne ne sait pas que Chance ferrait ensuite sans abri et sans argent sinon pour le cas – le jardinier est frappé par une limousine chère d’Eve Rand (Shirley MacLaine). Les vêtements luxueux et la retenue polie forcent la femme à penser que Chance est un homme riche. Eve prend Chance (elle pense que sa profession en anglais «Gardener» est son nom) à sa maison pour le guérir à l’aide d’un médecin de famille Dr. Robert Allenby (Richard A. Dysart). Ben (Melvyn Douglas), le marie d’Eve, est en train de mourir et ne quitte pas son immense maison, la plus grande aux États-Unis. Incroyable, mais Chance a plu Ben dès le premier mot. Bien que Chance puisse parler seulement de son jardin, Ben voit dans ses paroles la sagesse allégorique des paraboles. Amusé par le tact et la prévenance de son invité, millionnaire mourant présente Chance au président niais des États-Unis Bobby (Jack Warden). Chance «Gardener» devient une vedette tout américaine quand Bobby cite ses paroles. Après la mort de Ben qui a presque légué sa femme Eve à Chance, quelques hauts fonctionnaires de l’État discutent Chance comme un candidat à la présidentielle…
«Being There» est évidemment un testament de Peter Sellers. C’est lui, qui pendant presque une décennie essayait de mettre en marche l’adaptation de l’ouvrage de Jerzy Kosinski en pensant que le rôle de Chance est créé pour lui. Célébré grâce aux rôles excentriques dans «Pink Panther», «Dr. Strangelove» et «The Party», cette fois Peter Sellers construit les situations comiques sur le calme strict et sérieux de son personnage. Il n’y a pas encore de bouffonnerie et folie chaotique de ses films plus populaires. Juste avant la mort (l’acteur mourra six mois après la première) Sellers est devenu très sérieux. Dans «The Party» la naïveté de Hrundi V. Bakshi créait beaucoup de destructions et servait comme une arme de la satire contre la vie bourgeoise. Dans «Being there» il y a aussi une satire contre l’haute société, mais la naïveté de Chance devient un instrument de création. Le héros qui ne comprend rien aux relations humaines parvient à porter la lumière dans la vie des Rends. Sa sérénité et son altruisme ont ensorcelé un vieux requin d’affaires.
En effet Peter Sellers voudrait un peu raconter une histoire très personnelle, parce que l’acteur lui-même était une tabula rasa — un homme sans personnalité qui devait toujours être dans un rôle pour vivre plus loin. Sellers a vécu sa vie dans les rôles d’autres personnes et son personnage vit la vie d’autrui. Il se compose des vêtements et des manières de son maître, des paroles d’un guide de jardinage et des gestes des émissions de télé. Avec tout ça Sellers a réussi à créer une image d’un seul tenant. Hal Ashby a transformé de plus le film dans la représentation à bénéfice de Sellers. Tous les autres acteurs, même le grand Melvyn Douglas, jouent à la moitié de leurs forces, libérant la place de l’écran pour Sellers dont le plastique, les gestes et la voix sont tellement polis que nous pouvons lire la nature du héros même quand il va en arrière-plan, dans la profondeur du cadre. Et c’est Hal Ashby qui a créé le cadre dernier génial du film où Chance est comparable au Christ ni plus ni moins.
«Being There» aurait été un film très simple si Chance avait été seulement un homme taciturne, poli et absolument sans ambitions et sans intérêts matériaux. Dans ce cas-là, conformément au Sermon sur la montagne que je cite, le film deviendrait une parabole chrétienne. Mais le film d’Hal Ashby, tourné à l’époque quand la télé jouait le rôle de plus en plus important et les États-Unis survivaient des crises politiques, certainement a le deuxième fond. Les déclarations simples et droits du héros ont le prix seulement dans le contexte de la multivalence et dans les yeux d’interprète. Sur le poste du président, Chance risque à devenir une poupée parlante juste comme Ben, qui prononce les paroles d’autres sans comprennent leur sens. Et la question la plus importante – pourquoi à l’époque, quand Fellini démasque la télévision, Hal Ashby tourne le film où un homme complètement éduqué et obsédé par la télévision est devenu un saint ? Est-ce vraiment les simulacres télévisés peuvent créer quelque chose réelle et utiles ? En tout cas, je dois aller travailler dans mon jardin, quoi que vous en pensiez.
*** 1917, 2019. Cours, le caporal, cours !
Selon le titre le huitième film de Sam Mendes est consacré à la Première Guerre mondiale. L’intrigue se déroule sur environ vingt-quatre heures de la vie du caporal William Schofield (George MacKay) qui doit étant accompagné par le caporal Tom Blake (Dean-Charles Chapman) distribuer d’urgence un ordre du général Erinmore (Colin Firth) au colonel MacKenzie (Benedict Cumberbatch). Le chemin passera par un no man’s land — le territoire juste laissé par les Allemagnes. Théoriquement il n’y a pas d’ennemi, mais qui sait quels dangers attendent les soldats. L’ordre doit être distribué vers le matin, parce que le colonel MacKenzie va commencer une contre-attaque, ne sachant pas que la retraite des Allemagnes est la partie d’un plan réfléchi il y a longtemps. En route la perte d’un camarade, un sauvetage d’une bébé et quelques échauffourées avec l’ennemi attendent notre héros.
Cinématographe, cinéma, kínēma (du grec) : le film, c’est un mouvement par sa nature. Réalisant ça, Sam Mendes a tourné un film n’ayant que le mouvement. La forme est très simple : un chemin du point A au point B. On peut nommer peu de films avec tel sujet. Même dans «Mad Max: Fury Road», composant aussi seulement du mouvement, il y a un retour. Même dans «Le salaire de la peur» il y a un moment de retour bien que très-très court. Chez Sam Mendes il n’y a pas presque de pause — la circulation commence dès le vrai début du film et nous captive et capture. C’est un forme cinématique facile à regarder et en même temps très difficile à tourner, parce que pour un mouvement perpétuel Sam Mendes utilise la technique du plan-séquence, plus précisément de deux : avant et après la perte de conscience de William imaginée pour sauter la plupart de la nuit. Bien sûr dans un film de guerre cher et complique c’est très difficile d’appliquer cette technique et donc Sam Mendes et Roger Deakins utilisent le montage caché comme dans «The Rope» ou «Birdman». Oui, le film est très éloigné de l’élégance du film d’Iñárritu, de sa possibilité de presser le temps et de saturer le film par les connotations. À la guerre il n’y en a pas, les dernières, — tu dois atteindre l’objectif, tu dois aider aux Français et tu dois tuer les Allemagnes qui n’évaluent pas la miséricorde. Le sujet est très simple, mais justement sa simplicité nous permet nous donner à cette attraction formaliste. Le style de Mendes qui est très proche aux jeux vidéo (ce n’est pas par hasard que le film est tourné par le studio de Steven Spielberg) attire le public et met chaque spectateur dans la peau d’un soldat. C’est très significatif que la première large du film coïncide au centenaire de la promulgation du traité de Versailles – la vrai fin de la Grande Guerre.
Ici, le chemin est linéaire, les dialogues sont assez primitives, la musique modeste ne se tait que pendant la mort de Tom Blake et la rencontre avec son frère. Il semble que Sam Mendes ait décidé de tourner un film plus simple que ses films sur James Bond. En fait on doit chercher le grain de cet œuvre dans les deux choses — le jeu de George MacKay et le travail de Roger Deakins. George MacKay se personnifie dans un soldat ordinaire avec telle réalité et force qu’il est devenu un personnage hors de temps. Son image élancée peut être imaginée dans n’importe quelle guerre de l’Europe depuis le début du Moyen Âge — parfois il semble que son personnage soit venu dans le film d’une miniature médiévale ou d’une peinture du Greco. George MacKay, taciturne, pensif et persévérant rejoue très facilement tous les autres acteurs, même Benedict Cumberbatch, qui a joué son épisode si platement que vous ne croyez pas que ce soit lui. Si George MacKay est un acteur peu célèbre maintenant, le génie de Roger Deakins est très connu. L’un des (sinon le plus) directeurs de la photographie les plus talentueux dans le monde, pour lui, avec ses quarante ans d’expérience, c’est difficile de nous vraiment étonner, mais en tous cas il a créé l’image très digne. Cela s’applique non seulement aux mouvements de caméra bien réfléchis et impressionnants mais à la décision de couleurs. C’est incroyable, comment Roger Deakins crée au début du film l’image assez monochrome — il utilise seulement des nuances du brun poussiéreux de l’uniforme de soldat et juste un peu de gris. Ensuite, pendant la nuit on a plongé le héros dans l’enfer, dans le monde du feu et de l’ombre (un jeu de couleurs répété à la fin de «Skyfall»). À la lumière de l’aube le caporal traverse les eaux noires de Styx et au fur et à mesure que le héros approche aux soldats britanniques, le vert, le couleur de la vie, remplit l’image. Pour peu de temps à propos — l’attaque va commencer et le blanc deviendra le couleur dominant, le couleur de la mort qui entourera un brave caporal.
Mais la mort ne peut pas être la fin de cette histoire. À la fin du film nous voyons de nouveau la vie — William s’assied sous un arbre entouré par l’herbe ondulant. Dans ce moment du silence et la pacification Sam Mendes par un geste élégant transforme la ligne dans le cercle, parce que le film a commencé par l’image de William asseyant sous l’arbre, parce que la vie continue au-delà de la mort et parce que ce n’est pas l’histoire d’un soldat abstrait, mais celle d’un grand-père de Sam Mendes.
P. S. Le 6 avril 1917, la journée de l’action, est le jour d’entrée en guerre des États-Unis. Pas si simple comme dans «Dunkirk» mais la présence et le rôle des États-Unis est déposé.
*** Joker, 2019. Stand up — head up
Ayant participé dans deux film sur Batman, Joker enfin a obtenu un film propre réalisé par Todd Phillips. Arthur Fleck (Joaquin Phoenix) travaille comme clown, habite avec sa mère et vit presque seulement dans le monde de ses rêves — la réalité est cruel et sombre, tandis que dans l’imagination Arthur est un comédien invité à l’émission de télé très populaire de Murray Franklin (Robert de Niro) et il a une liaison avec une jolie voisine solitaire. Un gars mince et craintif, Arthur est inscrit auprès d’un psychothérapeute. Suite aux coupes budgétaires le service d’aide psychothérapeutique est fermé et c’est seulement l’un des problèmes tombés sur la tête d’Arthur dans quelques jours. Arthur est frappé par les ados dans la rue, il perd son travail, perd sa mère et sa première performance comme comédien dans un club échoue. Pire que ça — quelqu’un envoie l’enregistrement de la performance d’Arthur à Murray Franklin qui se moque de lui et l’appelle Joker. Privé de médicaments, Joker commence à venger à toute la société pour sa vie inutile. Il s’avère que la violence est le chemin le plus facile pour Arthur pour prouver qu’il n’est pas nul, vu qu’un collègue lui a donné un jour un pistolet. En tuant trois mauvais garçons riches travaillant pour Thomas Wayne (le père de Batman) dans le métro, Arthur devient le porte-parole de la haine des pauvres contre les riches et son masque de clown devient le symbole de cette protestation. Étant donné que le masque est le seul indice, la police ne peut pas attraper le tueur. Resté libre, Arthur va à l’émission de Murray Franklin et après un court monologue tue son moqueur en direct provoquant une vague immense de violence qui noie la ville Gotham dans le sang et le feu.
La nostalgie c’est l’un des vecteurs les plus importants du cinéma américain d’aujourd’hui. Deux exemples très significatifs de cette tendance ce sont «Once Upon a Time in Hollywood» et «The Irishman» qui rivalisent avec «Joker» pour l’Oscar du meilleur film. Le temps d’action de «Joker» est 1981 — la fin d’une décennie très orageuse quand la quantité d’assassinats a brusquement monté et les films cruels du Nouvel Hollywood ont rempli les écrans. C’est impossible de ne pas lier le film de Todd Phillips avec les films de cette époque-là. Parmi le cinéma de cette époque deux films viennent premièrement à l’esprit : «Death Wish» (1974) et «The King of Comedy» (1983). Il semble que les premiers meurtres commis dans le métro au moyen d’un revolver donné soient venus de «Death Wish» où un pacifiste joué par Charles Bronson ouvrit la saison de la chasse aux criminels pour le bonheur de tous les new yorkais ordinaire. Mais Paul Kersey, l’un des vigilants cinématiques les plus célèbres, aide la police à mettre de l’ordre dans la ville tandis que Joker la plonge dans le chaos et la violence. Ce n’est pas la différence des utiles c’est la différence des exécuteurs. Paul Kersey est un homme raisonnable conduit au désespoir, Joker est dès le début un psychopathe utilisant des antidépresseurs. Joker est une version plus grave de Rupert Pupkin et le film de Todd Phillips est inséparable de celui de Martin Scorsese. Rupert Pupkin joué par Rober De Niro était un fou qui rêvait de passer dans l’émission de Jerry Langford et à la fin il a obtenu ses dix minutes de la gloire. Pupkin n’a qu’un seul rêve et en réalité pas trop dangereux. Il n’est pas intéressé par la situation qui l’entoure. On peut vraiment imaginer que Murray Franklin joué par Rober De Niro lui-même, un comique qui n’est pas très talentueux, c’est Rubert Pupkin après une bonne trentaine d’années. Maintenant un autre comique de stand-up raté grandit. Celui qui veut non seulement assister à l’émission mais aussi faire un geste cruel exprimant le désespoir des couches inférieures. Joker devient le nouveau messie, le messie toujours plus proche aux gens ordinaires que son adversaire éternel — Batman (on voit ça clairement dans les films de Christopher Nolan).
Le succès festival de «Joker» et «The Shape of Water» montre la puissance du cinéma de genre moderne et le changement d’échelle des valeurs dans le septième art. Le succès festival de «Joker» et «La vie d’Adèle» prouve qu’aujourd’hui les band-dessinés sont quelque chose plus grande et significatif qu’un divertissement pour les adolescents. C’est évident que sans utilisation de la marque «DC» et le nom de l’ennemi juré de Batman l’histoire d’un autre guignard ne sera pas si populaire. Mais même la plaque signalétique de «DC», est-ce qu’elle peut expliquer un milliard de dollars de frais de cinéma ? Il y a quelques autres éléments qui rend le film attrayant pour le grand public. «Joker» est tourné très traditionnellement et le scénario linéaire est écrit par l’un des zombies (j’utilise le mot de Charlie Kaufman) qui ont assisté à l’un des master-class de Robert McKee et mémorisé le mot «l’événement induisant» (il y en a beaucoup : l’humiliation, le chômage, la mort de la mère, manque des tablettes etc.). Le jeu de Joaquin Phoenix — c’est vraiment une seule pierre précieuse dans le film. Une autre réincarnation magnifique de cet acteur qui devient de plus en plus fort au fil du temps est le plaisir cinématographique incroyable et un exploit d’acteur. Mais honnêtement cela peut ne pas suffire. Peut-être la force de «Joker» c’est la possibilité de saisir le zietgeist, les vraies pensées dans les têts des gens qui s’enfuient la réalité aux séances de Marvel mais dans la profondeur de leurs cœurs ils veulent changer la réalité à la manière d’Arthur Fleck.
** Marriage Story, 2019. Ren vs Romanoff
En fait le film de Noah Baumbach est consacré au divorce plutôt qu’au mariage. Charlie Barber (Adam Driver) est un réalisateur de théâtre new-yorkais dont la femme Nicole (Scarlett Johansson) a quitté Los-Angeles pour travailler et habiter avec Charlie. Après huit ans du mariage Nicole réalise qu’elle veut être indépendante et faire sa carrière de la réalisatrice sans son mari autoritaire. Il n’y aurait pas de problèmes si les Barbers n’avaient pas un garçon de sept ans Henry (Azhy Robertson) qui devient la pomme de discorde et presque la seule chose qui peut être divisée parmi les ex-conjoints. Nicole a déménagé à sa mère à Los-Angeles et elle s’arme des services d’une avocate très agressive Nora Fanshaw (Laura Dern) qui initie un procès judicaire. Charlie qui pensait naïvement que c’était possible de trouver une solution pacifique doit aller à Los-Angeles et embaucher aussi un avocat.
Les temps changent. Jadis un drame judiciaire «Kramer vs Kramer» est devenu le film le plus profitable de l’année aux États-Unis. Maintenant les drames familiaux ne peuvent pas faire la concurrence aux films de super-héros (où les deux acteurs principaux jouent activement). Vers le dixième minute on comprend que c’est le réalisateur qui a écrit le scénario. Vers le quinzième minute on comprend qu’il n’y a pas de travail de l’ingénieur du son — presque tout le son est synchrone et de plus il n’y a pas de musique. Faute de travail expressif avec le son et l’image, les acteurs deviennent la base du film. Adam Driver, un homme réservé combat avec obstination pour le fils contre Scarlett Johansson qui pleure trop. Il étoufferait sa femme pas son autorité sans Lora Dern — une femme très dégagée et sûre de soi — le personnage le plus éclatant dans ce film. Charlie n’a pas de proches et la mère et la sœur de Nicole sont très comiques. La chose la plus intéressante concernant l’ensemble des acteurs c’est la passivité et la tranquillité de Henry. Il n’a ni de crise de nerfs ni d’émotions fortes. De surcroît, et c’est très significatif — pour les parents Henry est presque l’objet, la chose de statut. Ils sont prêts à le déchirer en deux pendant le procès mais l’enfant de presque huit ans ne sait même pas lire ! L’infantilisme et l’amour-propre — c’est les problèmes les plus importants des héros. Et bien sûr — le système judiciaire américain qui est la cible de la satire de l’auteur. N’ayant pas ni désir ni pratique de pourparlers, les ex-conjoints ont dépensé d’énormes sommes d’argent pour garder leur indépendance financière et partager Henry, qui est resté un objet, 55 sur 45. La seule victoire éphémère dans cette bataille — c’est la carrière de réalisatrice commencée pour Nicole, mais elle n’est pas le héros principal de ce film. Quant à Charlie, la bataille lui a ouvert les yeux, il a gagné beaucoup d’expérience et la compréhension tardive des sentiments des autres. Pourrait-il en profiter davantage ? C’est la question. Valait-il des centaines de milliers de dollars et une psyché mutilée d’un enfant ? C’est l’autre question. Ce théâtre en conserve devrait-il être trente minutes plus courtes ? C’est la troisième question mais on ne la posera pas — après «The Irishman» également tourné par Netflix, c’est inutile.
** The Irishman, 2019. Seuls les vétérans vont au combat
Martin Scorsese et Robert De Niro se sont unis en 2019 pour tourner un film après la pause de 24 ans depuis «Casino». Le nouveau film de Scorsese appellé «The Irishman» est consacré à la mafia comme trois autres films de ce duo. Robert De Niro joue un sicaire au service de la mafia — Frank Sheeran surnommé «The Irishman». Ironiquement l’une des grand-mères de De Niro portait le nom O’Reilly, donc l’acteur lui-même est partiellement l’Irlandais. Pendant la Seconde Guerre Mondiale Frank Sheeran combattait en Italie où il a appris la langue et il a appris à tuer sans procès juste par ordre d’un officier supérieur. En revenant aux États-Unis Frank Sheeran travaille comme chauffeur mais bientôt il commence à travailler pour un gangster — Russell Bufalino (Joe Pesci). Il s’avère que Frank est un sicaire idéal — doué en meurtre, taciturne et plein de sang-froid. Quand la mafia établit des contacts Jimmy Hoffa (Al Pacino) — le président du syndicat des conducteurs routiers américains très populaire, Frank Sheeran va effectivement au service du dirigeant syndicaliste. Au cours de nombreuses années Frank Sheeran résolvait des problèmes de Hoffa, ils sont devenus amis. Mais quand Hoffa a décidé qu’il gérerait le syndicat sans contrôle mafieux, on a dit à Frank que Jimmy Hoffa devrait été tué. L’Irlandais a fait son travail parfaitement — personne n’a trouvé ni tueur ni donneur d’ordres, Jimmy Hoffa s’est dissous dans l’air. Le seul inconvénient que le tueur a obtenu, c’était la perte absolue de contact avec sa fille Peggy (Anna Paquin) qui toujours aimait Jimmy Hoffa et qui a deviné le rôle de son père dans sa disparition. Après la prison où Frank s’est trouvé pour une autre raison, Frank Sheeran finit ses jours dans une maison de retraite, oublié par tout le monde sauf les agents du FBI qui espèrent que le vieillard avoue avoir tué un ami avant de mourir.
Dans «Casino», le dernier film de Scorsese avec De Niro, les personnages les plus aimés par moi c’étaient deux sicaires, deux hommes d’âge dodus qui à la fin du film enlèvent les témoins indésirables avec la tranquillité pratique. Après les gangsters éclatants où incontrôlables Scorsese enfin a jeté son coup d’oeil sur ces travailleurs de pistolet et de nœud d’anguille. Le sujet principal reste comme dans «Casino» ou «Goodfellas» — l’envolée et la chute des gangsters. Mais leur vie et le style de Scorsese ont changé. Dans «The Irishman» il n’y a pas encore de montage frappant et de costumes voyants. En échange il y a beaucoup d’hommes trop sérieux et d’intrigues ennuyeuses politiques. La caméra ne vole plus comme une danseuse de ballet (nous nous rappelons l’image très longue et très prétentieuse dans un club dans «Goodfellas»). Pourquoi ? La réponse est simple — elle est vieille. Comme Scorsese, De Niro et tous les autres acteurs principaux, parmi lesquels on peut remarquer Harvey Keitel — le héros principal de «Mean Street», le premier film de gangster de ce réalisateur. Scorsese a essayé pour la dernière fois de reconstruire son style dans «The Wolf of Wall Street». Maintenant le temps de réflexion est venu pour lui au lieu du temps de mouvement. Le réalisateur a 77 ans, De Niro et Pesci — 76, Pacino — 79, Keitel — 80. C’est impossible de créer quelque chose très active et dynamique avec cette équipe. En réalité le changement des intérêts de Scorsese était évident dans «Silence» où le réalisateur se concentrait sur la question de foi. Martin regarde dans le silence de la vie dans l’au-delà et il voudrait nous montrer les gangsters qui survit à la vieillesse profonde. C’est un objectif un peu difficile parce que pour la plupart de mafiosi c’est exploit de rencontrer la vieillesse sans une balle dans la tête.
Pas de doute, Scorsese est une légende vivante de film de gangster. En réalisant que c’est impossible d’entrer deux fois dans la même eau (il se rappelle qu’il y a 24 ans la cible de la critique était la ressemblance de «Casino» à «Goodfellas»), Scorsese a dû faire avec le genre ce que John Ford avait fait avec western dans «The Man Who Shot Liberty Valance». Les années vécues donnent à Scorsese un avantage — l’expérience de vie et la compréhension de la vieillesse — le sujet presque toujours exclu de ce genre. Bien sûr pour fermer le genre Scorsese a dû choisir le gangster en chef de tout l’univers du cinéma — Robert De Niro qui les a joués en quantités innombrables depuis Bloody Mama (1970) de Roger Corman chez Scorsese, Coppola, Tarantino, Mann, De Palma, Leone et même Remis. Maintenant le temps de compter est venu. Il n’y a pas encore de fougue juvénile, de courses et de fusillades cinématographiques — au lieu de ça on voit le travail monotone et risqué décoré d’aliénation totale. Paraphrasant la question d’Antonioni on peut demander : pourquoi les films sur la vie longue doivent être longues ? Seulement un budget gonflé peut être la justification. Le film durant 209 minutes pourrait être une heure plus court ou une heures plus longue — personne ne remarquerait pas la différence, parce que Scorsese sait à suivre le rythme. Mais c’est une demi-heure plus longue que «The Godfather» — un chef-d’œuvre classique et épique avec beaucoup de péripéties et de conflits internes. Y en a-t-il ? Pas du tout. Frank Sheeran est une machine à tuer, un criminel privé d’émotions qui n’a jamais ni faute ni doute. Sauf problème de fille il n’y en a presque pas d’autre. Les conflits internes sont absents dans le sujet éternel de la trahison. Frank a tué Hoffa presque sans hésitation. Bien sûr il y a de suspense et de l’intérêt dans cette scène, mais Frank a déjà pris la décision (une nuit blanche ne compte pas). Étonnamment, mais les effets-spécieux très chers et très critiqués se sont avérés utiles pour le sujet — on a tourné la visage de De Niro dans un masque sans émotion (ILM a presque réussi à rajeunir l’acteur mais en même temps on a effacé toutes les expressions faciales). Incroyable, mais le rajeunissement digital n’est pas un problème pour Joe Pesci qui n’a pas été tourné depuis une décennie. Un retraité du cinéma rejoue facilement son partenaire plus célèbre en créant un personnage vivant en comparaison par rapport à la statue de Frank Sheeran. Quant à Al Pacino qui partage l’écran avec De Niro pour la première fois dans un film sérieux, cet acteur a encore beaucoup d’énergie propre qui n’est pas suffisant pour jouer le plastique d’un homme de quarante ans, mais suffisant pour pousser son adversaire ancien de «Heat» dans un coin d’image.
Ce qui est le plus important et le plus cher d’un point de vue artistique, c’est les derniers trente minutes du film. Le choix du cercueil par un homme qui en mettait d’autres et qui s’achetait seulement des voitures. Les mains tremblantes tenant une canne qui ne tremblaient jamais en tenant un pistolet. La porte ouverte de celui qui la fermait toujours (la dernière rime à «The Godfather»). Les images qui aujourd’hui peuvent et doivent être tournés seulement par Scorsese. Le réalisateur qui avec son acteur se sont déjà préparés pour son demain.